MOTO JOURNAL 1002 Essai Tourisme Voyager en Zéphyr
A la rentrée, on aime tous raconter nos vacances. A Moto Journal, cette tradition se perpétue d'année en année même sites activités et les destinations changent.
Pour sa part, Frank Péret, dernière recrue de MJ, a profité de ses quinze jours de congés pour effectuer 10 000 kilomètres au guidon d'une Kawasaki 750 Zéphyr. Ceci lui a permis de tester des accessoires, une moto "basique" enutilisation tourisme et surtout de vivre quelques moments forts en direction du soleil de minuit, via l Allemagne, le Danemark, la Norvège, la Suède et la Finlande. Par Franck Péret Deux jours avant la date du départ, aucune direction n'était définie avec certitude. La mission consistait à partir au guidon d'une Zéphyr et à la ramener deux semaines plus tard avec 10 000 bornes de mieux au compteur.
Destination typiquement routarde, le Cap Nord lui tendait les bras, mais tous les avis étaient unanimes: Tu vas t'emmerder, la Zéphyr n est pas une routière, il fait jamais beau en Scandinavie, les gens sont froids, c'est hyper cher, bourré de touristes et de moustiques Le moral remonté à bloc après ce panorama encourageant, j'eus l'espace de quelques jours une hésitation entre l'Espagne et la Grèce.
Mon esprit de contradiction reprenant le dessus la veille du départ, je bétonnais ma résolution : «Ce sera le CapNord ou rien». Ce revirement de destination était d'autant plus facile que je partais seul n'ayant pas le cceur à faire souffrir une passagère ou à entraîner un compagnon de route dans une telle galère.
Cap Nord Express La Zéphyr s'est comportée pour ce test routier.
Seul le confort pâtit d'une selle trop mince et trop basse. Elle aime tous les types d'itinéraires et conserve un excellent équilibre malgré la charge. La préparation des bagages et une visite à la banque (retrait de 7 000 F et souscription à un contrat Europeassistance, on ne sait jamais) suffirent à occuper les derniers instants de tranquillité. Après une mise à température laborieuse à l'aube, vers 10 heures, la moto chargée, équipée de ses accessoires (voir sujet annexe) et le pilote arnaché ont de suite pris leur rythme, soit 110 à 130 km/h de croisière du matin au soir. Arrivé au nord du Danemark, le premier bateau (choisi au pif) sera le bon, et la Norvège la terre d'accueil.
A mi-hauteur de ce beau pays je coupe par la Suède et rejoins la Finlande, direction plein sud. Pratique pour rallonger la sauce, ce détour me permet d'éviter une chose dont j'ai horreur, passer deux fois au même endroit quelque soit le sens de circulation.
Ainsi, le Cap sera atteint en longeant la frontière soviétique par la Finlande et la rentrée at home suivra les côtes norvégiennes.De retour dans mon placard de banlieue, le bilan se trace de lui même : en Scandinavie il fait plutôt moche, les gens sont froids, c'est hyper cher, bourré de touristes et de moustiques..., mais qu'est-ce que c'est beau, immense, sauvage et reposant Dommage, les finances au plus mal, il fallait rentrer sans réellement profiter du lieu traversé, mais quelle claque ces 10 000 km parcourus en quinze jours ! Le soir avant de m'endormir, je repasse les meilleures images du film.
Dommage que je ne puisse les montrer aux autres, le magnétoscope et la cassette sont incrustés sous mon scalp.
Chapelle perdue au fond des bois, temples blancs au coeur des villages, ancienne ferme transformée en hôtel ou hutte de bois à toit moussu, les constructions scandinaves dépaysent. Fabuleuses, les pistes suédoises ou finlandaises font office de nationales et proposent du relief, une surface dure et des sensations de conduite géniales. Trop rares, les panneaux indicateurs n'évitent pas au touriste de se perdre dans ce dédale de terre battue.
CE CHER CAP NORD ITINERAIRE 1000 KM EN 15 JOURS :
Préférant le style direct à la prose interminable,voici un condensé de ces quinze jours de route, issu du carnet de bord indiquant le kilométrage quotidien, les principales villes étapes et les faits marquants. L'itinéraire est grossièrement matérialisé sur la carte ci-jointe.Départ: compteur 18 200 km
• 28 juillet :
(1110 km) PARIS-CAMBR AI-LIEGE(B)-KOLN(D)-DORTMUNDHANNOVER-HAMBURG. Longue journée passée sur les autoroutes allemandes à faire du gymkhana entre les Trabant de l'ex-RDA et les cars polonais tous plus pourris les uns que les autres. A 22 h, je trouve un hôtel bon marché au Nord d'Hambourg.
• 29 juillet : (550 km)NEUMUNSTER-KOLDING(DK)-VIBORG-ALBORGFREDERIKSHAVN. Le petit déjeuner est copieux, l'étape courte et le Danemark plat (il y pousse des éoliennes). J'embarque pour la Norvège; les passagères rentrant au pays sont magnifiques. Les sept heures de traversée jusqu'à Moss m'obligent à chercher mon chemin en pleine nuit, il est minuit.
• 30 juillet : (704 km)MOSS(N)-OSLO-ELVERUM-STOREN-TRONDHEIMSTEINKJER. Le camping était cher et quelconque, la route peu variée, mais quel plaisir de traverser les villes où l'on croise de magnifiques jeunes filles en vélo dorées par le soleil ! Il fait beau et chaud depuis le départ.
• 31 juillet: (795 km)GRONG-TROFORS-DIKANAS(S)-GARDJONASARVIDSJAUR-ALVSBYN. En passant à l'est via la Suède on emprunte de grandes pistes damées, à travers des forêts interminables envahies de moustiques. Une large route en terre suivie depuis 40 km se rétrécit, de l'herbe apparaît au milieu, le sol devient mou et je tombe sur un rond point proposant une unique sortie, celle par où je viens d'arriver. Je crains pour l'autonomie, il n'y a pas âme qui vive à 60 km à la ronde, il sagit de ne pas se planter de piste. La journée se finit bien, le top-case est sorti de son logement et les moustiques m'agressent continuellement.
• 1 ' août : (582 km)LULEA-KALIX-TORNIO(SF)-OULU-KOKKOLAJAKOBSTAD. La Finlande me tend ses bras boisés, rectilignes et monotones. Croyant voir la mer en longeant la côte, c'est la déception, la forêt est omniprésente, les moustiques un peu moins.
• 2 août : (478 km)NYKARLEBY-SEINAJOKI-PARKANO-TAMPERESALO. Journée sans surprise, je rejoins des amis à Salô, dans un parc coureur de GP cross. Grâce à eux, je parle à nouveau français et me refais une santé en prenant quelques kilos.
• 3 août : (0 km)Repos. 4 août : (370 km)FORSSA-TAMPERE-JAMSA-JYVASKYLASUONENJOKI. Départ en fin d'après-midi, la pluie m'accompagne jusque tard dans la nuit et m'oblige à m'arrêter dans un hôtel pour tout faire sécher.
• 5 août : (730 km) KUOPIO-KAJAANI-AMMANSAARI-KUUSAMOKEMIJARVI-PELKOSENNIEMI. Les orages persistent, les routes en travaux repeignent de terre et de goudron la Zéphyr, mais de fortes pluies rincent le plus gros. Un BedandBreakfastéquipé d'un sauna efface cette dure journée.
• 6 oût : (808 km) SODANKYLA-IVALO-UTSJOKI-KARASJOK(N)LAKSLEV-NORDKAPP. Le retour du ciel bleu nous pousse en avant, le but, le Cap Nord est atteint à 22 h, c'est l'occasion de faire quelques clichés d'un coucher de soleil qui n'en est pas un. Faute de monnaie norvégienne, je ne mange pas et plante la tente dans la nature pour une nuit claire, froide (il fait 3°C) et silencieuse malgré les rennes broutant alentour.
• 7 août : (670 km) HONNINGSVAG-ALTA-ANDSELV-NARVIKSETERMOEN. Je me suis forcé hier à rouler, bien m'en pris car la météo tourne au crado. On fonce vers le sud, mais la route est mauvaise et belle à la fois (rennes, tunnel, toundra puis montagne). Le sac à dos, les bottes et le pantalon de pluie prennent l'eau, le pneu arrière commence à se lisser la gomme et le top-case s'est encore déboîté. Tout va bien.
• 8 août : (624km) NARVIK-FAUSKE-MO I RANA-MOSJOEN. La suspension arrière faiblit et doit être tendue au dernier cran pour ne plus talonner, j'économise le pneu amère en accélérant surtout sur l'angle. La fatigue entraîne quelques erreurs de conduite entre deux troupeaux de moutons ou de rennes en liberté, rencontrés au détour d'une épingle.
• 9 août : (998 km) TROFORS-GRONG-STEINKJER-TRONDHEIMOSLO-MOSS. Je roule comme un zombi et embarque à Moss sur le bateau de minuit quarante cinq, après 1000 km plutôt brumeux à travers mon regard flou.
• 10 août : (990 km) FREDERIKSHAVN(DK)-ARHUS-HAMBURG(D)HANNOVER-KOLN. La traversée sera mouvementée. On discute entre 'routiers' et belettes locales, la mer gigote un max mais nous portera jusqu'au Danemark à bon port à 8 h 30. Manquant de sommeil, des haltes deviennent indispensables toutes les deux-cents bornes. Il est presque 23 h quand je trouve enfin un hôtel allemand qui accepte un motard trempé.
• 11 août : (579 km) AACHEN(D)-LIEGE(B)-SEDAN(F)-REIMS-PARIS. Retour au bercail sans histoire sous un ciel enfin bleu. Arivée: compteur 28 188 km .
Pistes, routes ou autoroutes sont désespérément rectilignes sur des centaines de kilomètres;
On traverse des forêts si étendues, que les autochtones sont obligés de prendre une voiture pour relever le coursier dans leur boîte aux lettres, disposées sur le bord des grands axes.
Grace a elle le but a été atteint, la Zéphyr méritait bien un spot sur fond de soleil de minuit au Cap Nord.